mercredi 25 novembre 2015

Il était une fois dans l'Ouest (C'era una volta il West de S. Leone, 1968)




Magistral western, très célèbre, qui constitue l’apothéose du western italien (et il est en même temps très au-dessus de l’immense majorité de ces westerns).
Bien sûr, formellement, le film est exceptionnel. Résumant son film à l'exacerbation d'un style, Sergio Leone s'en donne à cœur joie : sa caméra déforme, grossit, exagère, attend, recule, tourne autour. Leone insiste et ne craint pas d’en rajouter en forçant le trait avec plaisir : il étire les séquences (la célèbre séquence d’ouverture avec les trognes des tueurs qui attendent le train) et son style maniériste confine volontiers à la caricature (et à l’humour également, même s’il est moins présent que dans Le Bon, la Brute et le Truand). Et Leone cite ses sources, aussi bien dans la distribution (au-delà de Henry Fonda, Jack Elam, par exemple, fait une apparition légendaire) que dans plusieurs séquences (hommage à John Ford, à L'Homme aux colts d'or, au Train sifflera trois fois). Ennio Morricone signe la bande originale que l'on sait et le film est jouissif.


L'utilisation de Henry Fonda en grand méchant est géniale : Fonda est un des acteurs qui, tout au long de sa carrière, aura incarné par excellence le bon, le valeureux, l'humble qui se bat par nécessité ou pour réparer une injustice, que ce soit chez Ford (My Darling Clementine), chez Lang (J'a le droit de vivre) ou Lumet (Douze hommes en colère). Son image, déjà écornée dans le western de E. Dmytryk L'Homme aux colts d'or, est ici détournée et utilisée pour le personnage de Franck, qui est l'archétype du tueur, diamétralement opposé à l'image qu'il a chez le spectateur américain. Son calme, son phrasé doux et son jeu intériorisé font merveille.
Bien entendu il n’y a pas de sens profond à tirer de ce film (ni à aucun des westerns de Leone) : il s’agit d’une histoire de vengeance très simple. Les personnages et les situations sont évidemment caricaturaux. Il s'agit donc, sur ce point, d'un net retour en arrière par rapport à l'aboutissement des westerns américains classiques (ceux de Ford, Mann ou Hawks). Mais là n’est pas l’enjeu et il ne faut pas bouder son plaisir.

Le problème est que le western ne se relèvera pas de cette simplification du fond. Le filon italien sera exploité jusqu'à plus soif – le style de Sergio Leone sera copié mille fois – puis le western sera enterré (par quelques réalisateurs tels que S. Peckinpah ou R. Altman) et, ensuite, le western restera moribond.
Et, malheureusement, le succès des films de Leone est tel qu’il occulte complètement le western d’avant : aujourd’hui ce genre est d’abord connu au travers de ces films "spaghettis" et on oublie les chefs-d’œuvre qui les ont précédés. Bien souvent la connaissance de ce genre se fait par les westerns italiens (ce qui laisse penser que le genre n'a jamais eu grand chose à dire), alors qu’ils ne sont qu'une évolution (caricaturale) d’un genre beaucoup plus ancien et très riche.



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