dimanche 12 avril 2015

Nosferatu le vampire (Nosferatu, eine Symphonie des Grauens de F. W. Murnau, 1922)




Nosferatu est un des films les plus exceptionnels du cinéma muet et l'un des plus incontestables. Sa renommée et son influence sont considérables.
F. Murnau adapte le Dracula de B. Stoker (il en change le nom pour s'éviter des problèmes de droit d'auteur mais garde la trame précise du récit) et met en scène avec génie son monstre. Le film est structuré en différents mouvements (arrivée d’Hutter dans la demeure du comte, départ du comte, etc.), comme pour une symphonie (symphonie à laquelle se réfère le titre original), qui font progresser le film de l’inquiétude à la peur puis à la terreur (Murnau parvient à écraser ce pauvre Hutter sous l’emprise d’Orlock ; ville envahie par la peste). Le dénouement est difficile : la ville est sauvée au prix d’un sacrifice.
Max Shreck campe un Orlock inoubliable, et ses apparitions – rares – sont autant de chocs reçus par le spectateur. Il faut remarquer combien l’apparence du personnage que lui donne Shreck contraste avec d’autres compositions ultérieures (celles de Bela Lugosi ou de Gary Oldman, beaucoup plus romantiques).


La mise en scène du monstre est toujours extraordinaire, la puissance de l'image est ici totale. Parmi dix autres exemples on peut citer la séquence fascinante où Ellen se sacrifie en s'offrant à Orlock et l'attire. Le style expressionniste est à son apothéose : l’ombre de Orlock qui glisse dans l'escalier, l'ombre de sa main qui vient se fermer sur son cœur, tout cela est un aboutissement stylistique et ouvre une nouvelle porte immense pour les cinéastes qui peuvent alors se passer de montrer directement et chercher simplement comment suggérer.
Mais si Nosferatu est un aboutissement de l’expressionnisme (voir la séquence du sacrifice d’Ellen) il en est aussi un dépassement : Murnau utilise des décors extérieurs (ce qui s’oppose à la tradition allemande de l'expressionnisme) qu’il fait baigner dans des lumières étranges et variées. Et il donne libre court à son art du contrepoint en multipliant les narrations parallèles (attente d’Ellen, arrivée du bateau envahi par la peste, retour d’Hutter, etc.).
Orlock et Hutter représentent les deux faces de la pulsion qui les attire vers Ellen : à la pulsion d’amour du jeune homme répond la pulsion de mort du vampire. Ce sont les deux aspects du héros romantique qui sont représentés.

La veuve de Bram Stoker a intenté différents procès pour faire détruire les copies du film. Elle réussit partiellement mais son décès ainsi que la réapparition de copies cachées ont pu sauver ce film de la destruction, avant une restauration de l'oeuvre dans les années 80.

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