mardi 20 mai 2014

Scarface (H. Hawks, 1932)




Film fondateur, Scarface met en scène plusieurs éléments qui sont devenus des grands fondamentaux du film noir. Avec une virtuosité teintée d’idées brillantes (notamment la manière détournée de filmer la violence), Howard Hawks déroule ce qui deviendra un grand classique : la montée d’un petit truand pour prendre le pouvoir d’un des gangs de la pègre.

Le film de gangsters était alors très en vogue, avec en particulier L’Ennemi public de W. Wellman ou Le Petit César de M. LeRoy, ou encore Les Fantastiques années vingt de R. Walsh en fin de décennie. Pourtant Hawks eut beaucoup d’ennuis avec la censure et il dut donner des gages de moralité, notamment en intégrant des séquences avec le procureur condamnant clairement les agissements des gangsters (d’où le sous-titre « honte de la nation »).
Hawks, tout en maîtrise, au milieu d'un récit linéaire ponctué de nombreuses scènes d'action, se permet d’intégrer un personnage clairement humoristique (Angelo), de faire des pauses dans son récit, d’épaissir considérablement la psychologie de Tony Camonte en développant une relation quasi-incestueuse avec sa sœur. Et puis, il faut bien le dire, le cinéma américain n’a pas son pareil pour montrer des poursuites en voitures toutes sirènes hurlantes, des rafales de mitraillettes tirées d’une fenêtre, des exécutions sommaires dans des bars clandestins.

C’est dans la mise en scène des séquences les plus violentes (avec de nombreux règlements de compte) que le génie de Hawks éclate. La séquence d’ouverture (magistral plan-séquence qui aboutit au meurtre de Big Louis) est superbe : la caméra glisse et joue avec les ombres, dans le calme tranquille du meurtrier sifflotant. De même lorsque Tony et ses hommes déboulent au bowling : le meurtre de Gaffney est évoqué superbement par la quille de bowling qui tourne sur elle-même et s’abat.


Au bowling, Gaffney (Boris Karloff) s'apprête à jouer...
... c'est la chute de la dernière quille qui symbolise sa mort.
De même encore lors du massacre de la saint Valentin, ce sont des ombres portées sur le mur qui sont criblées de balles.


Les ombres de la bande rivale bientôt criblées de balles.
B. De Palma s'en souviendra quand il réalisera son extravagant remake où, à l'opposé de Hawks, il cherchera, à chaque explosion de violence, à montrer un bain de sang de façon toujours plus sanglante. On trouve de telles idées de mise en scène chez d’autres réalisateurs (par exemple Association criminelle de J. H. Lewis) mais la variété et la multitude des représentations de la violence est ici époustouflante.



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