jeudi 10 décembre 2015

Inception (C. Nolan, 2010)



Inception Christopher Nolan Leonardo Di Caprio Affiche Poster

Le film a rencontré un grand succès et Christopher Nolan a reçu mille éloges à son propos. Nolan, nous expliquait-on, ne prend pas les spectateurs pour des imbéciles en leur soumettant un film complexe. Et on trouve sur internet mille sites dédiés qui cherchent à interpréter le film et tentent de comprendre le totem de tel ou tel personnage et cherchent à démêler le rêve de la réalité (grande question s'il en est : la petite toupie oscille-t-elle à la fin ? Ah mais oui, la toupie n'est pas le totem de Cobb, c'est son alliance !, etc.).
Il est vrai que le scénario est intéressant et qu’il est assez alambiqué. L’idée des différents niveaux de rêves avec des temps dilatés est très bonne. L’action est bien tenue (quelques séquences sont très réussies) et Leonardo Di Caprio continue de se bonifier film après film (même si son personnage peut provoquer quelques réminiscences : il a beaucoup de points communs avec celui incarné par le même Di Caprio dans Shutter Island, sorti peu de temps avant). La petite troupe emmenée par Cobb ressemble un peu à celle de Tom Cruise et sa bande dans Mission Impossible mais on se laisse embarquer par l’histoire (la séquence d’action qui ouvre le film est impeccable).
En passant Nolan distille de nombreuses références : de 2001 à Matrix, en passant par le film d’animation Paprika à qui il reprend l’idée de s’introduire dans les rêves d’un autre, etc.

En revanche, et c’est là que le film est décevant, ce n’est qu’un film de scénario. C’est-à-dire que le principe intéressant du film (et qui est à l’origine des nombreuses interprétations) consiste à naviguer entre rêve et réalité mais, malheureusement, Nolan ne joue pas avec cette différence dans les images qu’ils proposent. Les « architectes » font bien des décors (et cela nous vaut quelques scènes amusantes) mais il n’y a pas de manipulations d’images. On sait bien que Lynch, Kubrick, Tarkovski ou Fellini – pour citer quelques grands faiseurs d’images – ne filmeraient pas de la même façon le rêve et la réalité. Ils y distilleraient une part d’étrangeté, de malaise, de bizarrerie dans l’image elle-même. De même Polanski, Roeg, Cronenberg, Herzog, De Palma, Jodorowski. Mais pas Nolan. Et ce sont les rebondissements du scénario qui proposent de l’illogique (un train qui déboule tout à coup) mais ce n’est pas l’image en tant que telle, Nolan « n'en profite pas ». Pas de nains étranges comme dans Solaris, pas d’iguane bizarre qui traverse l’écran comme dans Snake eyes. Qu'on pense aussi à Shining, à Répulsion ou encore à eXistenZ et l'on comprend combien l'image peut dépasser la narration et devenir une expression par elle-même.
Dès lors le mélange intéressant réalité/rêve/souvenir a uniquement ici un but narratif. D'ailleurs le scénario s'ingénie à rendre service au réalisateur puisque, dans Inception, il faut que le rêve ressemble à la réalité. C’est ainsi que Nolan est décidément un très bon narrateur mais ce n’est pas un créateur d’images.

Dès lors il n’y a pas d’émotion cinématographique, il y a juste une histoire, par ailleurs plutôt plaisante à suivre. On peut se dire que Nolan a juste voulu faire un bon divertissement et s'en contenter. Mais avec un scénario pareil il y avait pourtant de quoi faire. Alors on se laisse prendre par les péripéties qui sont racontées de façon efficace mais décidément trop lisse, trop hollywoodienne : c'est un bon film d'action, voilà tout.

Un plan très kubrickien pour cette séquence en apesanteur

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