jeudi 10 septembre 2015

Raging Bull (M. Scorsese, 1980)




Magnifique film de Martin Scorsese (qui n’aime pourtant guère la boxe !) : celui-ci s’appuie sur l’histoire du boxeur de Jake LaMotta pour brosser le portrait d’une rédemption.
La virtuosité de Scorsese est manifeste, depuis ses choix esthétiques (le noir et blanc notamment), ses choix narratifs avec des ellipses, des cuts brusques qui emmènent au cœur des combats, des répétitions (les disputes conjugales articulées autour des soupçons de Jake) ou encore des jeux d’images dont il est coutumier  (depuis le ralenti du générique jusqu’aux combats filmés in situ, en passant par le plan-séquence emmenant LaMotta des vestiaires au ring, lors de son match contre Marcel Cerdan).


La maîtrise de l’image, du rythme, de la musique ou des transitions entre séquences est parfaite. La violence, intrinsèque à tant de films de Scorsese, trouve ici, dans les coups de poing infligés ou dans l’impulsivité destructrice du héros, une nouvelle expression.
La qualité de l’interprétation fascine. Le jeu de Robert De Niro est resté célèbre : il n'a pas hésité à prendre quelques trente kilos pour interpréter un Jake LaMotta vieillissant. Interprétations impeccables, également, de la part de ses compères Joe Pesci (quasi débutant ici) ou encore Frank Vincent, qu’il retrouvera, toujours avec Scorsese aux commandes, dans Les Affranchis ou Casino.


Jake La Motta reste longtemps persuadé que tout se règle à coups de poing, sur le ring et que seuls ses combats comptent. Cet enfermement le condamne et le sort du monde dans lequel il vit, affrontant tous ses proches. C’est ainsi qu’il détruit sciemment le visage d’un adversaire, à propos duquel sa femme avait eu le malheur de dire qu’il était beau gosse, ou bien qu’il se laisse détruire à son tour par Sugar Ray Robinson, ne cherchant plus à esquiver les coups. Ce rapport au corps (l’obsession du poids, la violence des coups qui marquent) est une thématique passionnante qui traverse le film.
Ce n’est qu’après avoir rangé les gants et après avoir tout perdu (sa femme, son club), une fois qu’il est en prison, que Jake LaMotta voit combien il est vain de cogner à tout va : il comprend ce qu’il a perdu et, ensuite, il prend conscience de ce qu’il est et il s’apaise. C’est dans cette autre vie, loin des rings, loin du succès, loin des coups de poing, le corps avachi, qu’il peut recommencer à vivre, lentement, sans être en guerre sans cesse contre le monde entier.


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