samedi 28 octobre 2017

L'Armée des douze singes (12 Monkeys de T. Gilliam, 1995)




Très bon film de Terry Gilliam, réalisé à partir de La Jetée de Chris Marker. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un remake, l’œuvre de Marker étant pour le moins expérimentale et particulière.
Gilliam s’applique d’abord à reconstituer une version personnelle de l’univers pour le moins glauque et inquiétant évoqué dans La Jetée : on reconnaît la patte du réalisateur et son goût pour les ambiances organiques, gluantes, faites de tubulures, de battements et de pulsations étranges (on pense à Brazil). Il s’appuie ensuite sur plusieurs allers-retours temporels, qui s’éclaircissent progressivement pour le spectateur, à mesure que le récit se densifie et s’interpénètre. De façon très différente et beaucoup plus simple que chez Marker, le héros est envoyé dans un temps passé qui n’est pas une construction autour de ses propres souvenirs mais un voyage dans le temps « classique ». L’idée d’un virus ravageur est un enrichissement par rapport au film de Marker (qui s’appuyait sur un conflit nucléaire pour évoquer une humanité décimée), puisqu’il introduit le ressort du film (à savoir : rechercher les origines de ce virus qui s’est répandu). Chez Marker le film reste centré sur les émotions du personnage, sur ses sentiments naissants à propos de la femme de ses souvenirs. Chez Gilliam, James Cole n’oublie pas sa mission (même s’il cherchera à ne pas retourner dans son présent et à rester aux côtés de Kathryn). Le film tient donc tout autant du thriller que du drame. La réussite du film tient sans doute à ce double aspect et à cet équilibre entre les deux.


La fin, avec toute une séquence au ralenti, est très convaincante et elle réussit la gageure de faire retomber sur ses pieds un scénario articulé autour des voyages dans le temps. Le ralenti étant bien souvent une tarte à la crème fatigante des films actuels, il est d’autant plus agréable de voir une séquence entière menée au ralenti de façon pertinente et justifiée.
Comme chez Marker, mais de façon plus directe encore, la référence à Vertigo est explicite (le film est même cité), avec notamment une réflexion qui dépasse celle du cadre du scénario lorsque Cole explique : « Le film est toujours le même, il ne change pas, mais à chaque vision il semble différent parce qu'on est différent, on le voit différemment ».


On notera le second rôle de Brad Pitt qui, bien que star mondiale, n’hésite pas à interpréter un rôle très en retrait par rapport à Bruce Willis, véritable et efficace star du film. On continuera d'ailleurs de retrouver Brad Pitt, et c’est tout à son honneur, dans des rôles parfois très secondaires, qui semblent petits pour sa stature internationale, dans Snatch ou The Big Short par exemple.


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