jeudi 21 mai 2015

Le Dictateur (The Great Dictator de C. Chaplin, 1940




Très grand film de Chaplin, son premier qui soit réellement parlant. On sait que Les Temps modernes est, au sens strict, parlant, mais ce n’est qu’ici qu’il fait parler son personnage principal (Charlot ne fait que chanter, en grommelot, dans Les Temps modernes). Cette prise de parole est importante : elle participe du renoncement à son personnage  de Charlot (dont le barbier a bien des réminiscences, d’autant plus tant qu’il parle peu) et elle permet un discours final célèbre.
Chaplin, superstar, s’élève donc, en pleine guerre, contre Hitler et son régime épouvantable. Il se permet de dénoncer les injustices et les crimes nazis en faisant rire (le barbier dans son ghetto), caricature à tout va Hitler en particulier, dans un flamboyant discours (proche du grommelot là encore) dont la portée, à la fois comique et terriblement inquiétante, fait mouche.
André Bazin a très bien expliqué comment l’argument du film (la confusion entre le barbier et Hynkel) tient à la moustache de Chaplin qui lui permet d’interpréter à la fois la victime et le bourreau. Sans cette moustache, célèbre dans le monde entier et symbole de l’immense force comique de Chaplin, jamais celui-ci n’aurait pu, de cette façon à la fois si évidente et efficace, caricaturer Hitler.
On regrettera quelques fautes de rythme qui ralentissent la narration et le message du discours final, à la fois très politique et engagé. Il faut toute la conscience du moment de ce discours (on est en 1940) pour occulter sa lourdeur et son moralisme. On est là bien loin de la légèreté géniale et intemporelle du mime.


On notera que, dans To Be or Not to Be, Lubitsch ne se gêne pas non plus et, lui aussi en pleine guerre, met en scène Hitler et son sosie, et joue avec génie autour de cette confusion.

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