mercredi 17 avril 2013

Monsieur Klein (J. Losey, 1976)





Excellent film de Joseph Losey qui montre le cheminement d’une conscience qui, entièrement tournée vers soi, de force, se met à devoir prendre conscience d’autrui. Archétype du profiteur cynique – il rachète à bas prix les œuvres d’art de Juifs aux abois – Robert Klein est confondu avec un homonyme juif.


La force du film est dans le cheminement du personnage qui se trouve obligé de se tourner vers autrui – ici le Juif – et à embrasser ses malheurs. Bien plus : il se met à assumer cet état de Juif qu’il n’est pourtant pas. Et il comprend que ce qu’il subit – ou ce qui le menace – ne serait pas moins odieux s’il était réellement juif. C’est cette prise de conscient qui lui fait accepter de subir ces violences. Et il consent à sa disparition au milieu de tous les autres, dans la rafle du Vel’ d’Hiv.

C’est ainsi que Joseph Losey emmène jusqu’au bout son personnage, dans une quête de son double qui est un chemin d’inversion et de conversion étonnant, allant jusqu’à se confondre avec autrui. Dans une ambiance glacée et noire, toute l’enquête de Klein, toutes ses démarches ou ses visites n’aboutissent qu’à ce retournement progressif du personnage contre lui-même, pendant que l’administration de son côté, se retourne progressivement contre lui. Il commence à signaler ce qui est pour lui inacceptable – être confondu avec un homonyme juif – se plaindra, se mettra en colère puis ouvrira les yeux. Et toue la violence intérieure (que Delon retransmet avec une espèce d’impassibilité dérangée géniale) épousera le calme du juste quand, au Vélodrome d’Hiver, il se laisse entraîner volontiers.


Les deux premières séquences – le monstrueux examen médical et la vente du tableau à Monsieur Klein (auquel répondra le court dialogue final) – plante le décor de cette France sous l’Occupation, où l’on est dépouillé de son identité (physique ou historique) et, bien vite, de son humanité.

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