lundi 24 septembre 2012

Hiroshima mon amour (A. Resnais, 1959)




Premier film important de la Nouvelle Vague, Hiroshima mon amour frappe d’abord par son récit qui détruit la narration classique : ici le présent du couple étreint se mêle avec des souffrances d’Hiroshima, qui viennent comme des diapositives, sans autre logique que l’énumération du personnage.
Le film semble d’abord montrer l’inanité de l’entreprise de mémoire, comme si le musée, les rescapés, tout cela ne permettait pas de faire resurgir dans le présent l’idée de la souffrance du passé.
Mais en réalité, cette exploration d’une souffrance qui n’est pas la sienne va faire ressurgir ses propres souffrances. Sa propre histoire, à la fois si différente et si proche (c’est la même guerre), à la fois si ambiguë (on retrouve en elle le même mélange qu’ont les civils devant la bombe : à la fois victimes et coupables).
L’homme et la femme, alors, qui fuyaient leur passé, vont pouvoir l’affronter : par la parole, par l’interpénétration de leurs traumatismes, par leurs étreintes qui viennent rassembler ces histoires.



Resnais, renonçant à toute hiérarchie des souffrances, fait se rejoindre Nevers et Hiroshima, heurte le film à coup de montages brusques, de sons qui s’interrompent, de fulgurances visuelles, d’une évocation parfois incantatoire (aussi bien de Emanuelle Riva que de Eiji Okada qui s’exprime en français phonétiquement). Resnais poursuit ainsi son travail sur la mémoire, après Nuit et brouillard et avant L’année dernière à Marienbad. Les nappes de passé viennent ici affronter le présent et elles s’entrecroisent dans le lit du couple.

Le film a un impact critique important mais, surtout, par sa liberté de narration et sa liberté de montage, il aura beaucoup d’influence. Il faut souligner d’ailleurs combien Alain Resnais est peut-être le réalisateur de la Nouvelle Vague qui a eu le plus d’impact à l’étranger, en particulier auprès des jeunes réalisateurs américains qui, une dizaine plus tard, seront au cœur du Nouvel Hollywood.

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